Photo Couresy of:

Canada basketball

Q&A : Fabienne Blizzard parle de sa nomination au poste d’entraîneure-cheffe de l’équipe nationale des moins de 16 ans et de son parcours d’entraîneure

U16 Femmes

/

5/4/2023

Depuis que sa carrière de joueuse a pris fin après avoir été diplômée de l’Université d’Ottawa en 1994, Fabienne Blizzard est devenue entraîneure à plein temps.

Elle est passée du côté du banc après une carrière avec les Gee-Gees qui lui a valu d’être intronisée au Temple de la Renommée, et elle est en fin de compte devenue entraîneure-cheffe du programme en 1998. Aujourd’hui, Blizzard sera de retour avec le Canada alors qu’il a été annoncé un peu plus tôt cette semaine qu’elle serait l’entraîneure-cheffe d’Équipe Canada au Championnat féminin des Amériques FIBA U16 qui aura lieu du 12 au 18 juin 2023.

Après avoir été entraîneure adjointe avec différentes équipes féminines de groupe d’âge pour Canada Basketball, Blizzard va faire ses débuts en tant qu’entraîneure-cheffe de l’équipe nationale cet été.

Nous avons parlé avec Fabienne un peu plus tôt ce mois-ci afin de discuter de cette opportunité, du futur de Canada Basketball, de son parcours d’entraîneure et plus encore.

Vous avez été entraîneure adjointe avec Canada Basketball ces dernières années. Qu’est-ce que ça fait de savoir que vous allez être entraîneure-cheffe d’une équipe nationale cet été ?

« C’est excitant. J’ai hâte d’y être. J’ai beaucoup appris des personnes qui étaient là avant moi. J’ai beaucoup de chances d’avoir participé aux camps depuis longtemps et d’avoir appris d’entraîneurs différents et de systèmes différents. J’adore le basketball, donc j’adore assister à tout ce qui a trait au basketball et j’adore être entourée de personnes qui partagent la même passion.

C’est pour cela que je suis très contente de pouvoir évoluer à ce niveau avec tout le monde, en utilisant tout ce que j’ai appris avec les entraîneurs avec qui j’ai travaillé. J’adore avoir l’opportunité de pouvoir donner envie aux jeunes femmes de jouer au basket au Canada. Je pense que c’est ce qui compte le plus pour moi. Je veux qu’elles soient autant passionnées que moi. Je pense que c'est ce que nous devons faire avec cette nouvelle génération d’athlètes, leur faire comprendre combien c’est génial de représenter son pays sur le devant de son chandail et sa famille sur le dos de son chandail. »

Vous faites partie de Canada Basketball depuis 2018 et vous faites bien évidemment partie du basketball canadien depuis bien plus longtemps. Qu’est-ce que cela fait d’assister à cette croissance continue du basketball féminin ?

« Pour moi, cela en dit long sur le Canada et sur ce que nous réalisons. Le fait que Canada Basketball a fait de son travail avec tous les entraîneurs de la nation une priorité est un signal fort. Cela veut dire que beaucoup d’entre nous commencent à développer les jeunes femmes de la même manière, pour leur permettre de rêver à jouer au niveau supérieur, donc de notre côté, nous devons essayer de comprendre sur quoi nous devons nous concentrer. C’est très important pour nous d’avoir un endroit où nous pouvons partager nos connaissances, se mettre en phase avec tout le monde, et donner des opportunités à ces jeunes femmes. »

Blizzard avec Équipe Canada lors de la Coupe du monde féminine FIBA U17 2022

Comment décririez-vous une équipe menée par Fabienne Blizzard ? Qu’attendez-vous de votre groupe cet été ?

« Je veux avoir une équipe très disruptive. Une équipe qui ne va pas vous laisser faire les choses que vous voulez faire et un groupe réputé pour être une des meilleures équipes défensives. Les autres équipes vont devoir faire quelque chose de différent quand elles joueront contre nous, parce que notre but est de vous perturber. »

Vous avez fait partie des joueuses vedettes des Gee-Gees d’Ottawa et vous avez été nommée « All-Star » OUA par trois fois. Quand avez-vous su que vous vouliez devenir entraîneure après votre carrière de joueuse ?

« J’ai commencé à jouer au basketball assez tard et aller en CEGEP m’a donné des années supplémentaires, donc cela m’a permis de vraiment affiner mes compétences et d’être de plus en plus passionnée par le basket. C’était la chose la plus importante, je voulais rester dans ce sport. Même quand j’étais encore à l’université, mon entraîneure  (Wanda Pilon) me disait « Fais une pause. » J’étais tout le temps dans la salle pour tirer. À chaque fois que j’en avais l’occasion, quand il y avait une pause entre deux cours ou une pause pendant l’été, j’en profitais pour aller à la salle et tenter de faire des progrès.

Dès que j’ai obtenu mon diplôme, mon entraîneure m’a demandé de faire une pause. Mais j’ai dit non. Je voulais être une entraîneure apprentie tout de suite et je ne voulais pas m’en aller. Je voulais être entraîneure en développement et je faisais des analyses vidéo, à l’époque on utilisait des cassettes, donc c’était beaucoup plus difficile. J’étais prête à démarrer et à faire le travail. 

Je me demandais toujours « Comment est-ce que je peux rendre quelqu’un passionné de basket autant que je le suis ? » Je voulais que les gens soient aussi passionnés que je l’étais et je voulais rester. Donc c’est ce qui s’est passé. Je voulais démarrer. Mais elle m’a aussi forcé à travailler avec la communauté et m’a dit « Bon, c’est trop facile, parce que tu es avec des joueuses universitaires qui arrivent déjà avec de très bonnes bases. J’aimerais que tu commences en passant par la communauté où certains de ces enfants vont juste jouer dans les ligues locales et tu vas devoir trouver comment les faire progresser. » Quand j’ai commencé, j'ai détesté ma vie pendant la première année. Je me disais « Oh mon dieu, c’est tellement dur d’apprendre des choses à un enfant de 12 ans et de se mettre à leur niveau. » J’ai réalisé que si je voulais qu’ils aient la même passion que moi, il fallait que je change de style, l’approche entre une joueuse universitaire et un enfant de 12 ans est complètement différente. 

Cela m’a poussé à faire attention à la façon dont je communique en basketball et comment je dois transmettre ce que je veux qu’ils apprennent et créer une atmosphère qui les fera revenir. 

C’est comme de la rétention. Je me demandais « Comment puis-je les faire revenir à mon entraînement. » Je voulais qu’ils reviennent la semaine suivante sans avoir à jouer à « bump » ou « H-O-R-S-E. » Ce sont les choses qui m’ont permis d’aimer le défi et je pense que c’est pour ça que j’ai continué. Tout constituait un défi. Je disais « Ça va être difficile parce quecomment je vais trouver la solution maintenant ? » Je pense que c’est pour ça que c’est mon travail à temps-plein était de la gestion de projet et de la gestion du changement, c’était ce que je devais faire. Il fallait que j’essaie constamment d’améliorer les choses et dans mon travail au quotidien. Et puis je me suis mis au basket, et c’était la même chose. Je pense que j’adore relever des défis. »

Vous dites que Wanda Pilon fait partie des personnes qui vous ont donné des conseils au début de votre carrière d’entraîneure. Est-ce une entraîneure qui, qu’en vous pensez à votre carrière, vous a vraiment influencé ?

« Oui. J’ai toujours eu des hommes entraîneurs. C’est la première femme entraîneure que j’ai eu. Et c’était différent. C’était très différent. Le ton était différent, dans tous les aspects. C’était une façon différente d’apprendre. J’avais toujours eu des hommes entraîneurs.

La première personne qui m’a vraiment influencé était l’entraîneur que j’ai eu au secondaire. La seule façon pour moi de jouer au basket et le moyen pour que mes parents acceptent, parce que j’habitais tellement loin de l’école, était d’être raccompagnée jusque chez mes parents. Grâce à lui, j’ai joué. Je ne pense pas que j’aurais joué au basketball. L’entraîneur que j’ai eu au secondaire est la première personne à m’avoir transmis sa passion. Il était vraiment passionné de basket. 

Et puis j’ai eu Wanda à l’université et c’est à ce moment-là que je me suis dit « Oui, je veux continuer à jouer. » »

Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans votre rôle d’entraîneure ?

« Les gens. Le défi quand on entraîne, c’est les personnes qu’on entraîne. Cela veut dire qu’il faut prendre le temps de les connaître. Comprendre leur identité est une des choses que je souhaite comprendre. Qui sont-ils ? Et aussi comprendre leurs origines, le côté familial, le côté culturel. Le Canada est un pays tellement divers. Les gens viennent de partout. Certaines personnes oui elles sont canadiennes mais qu’en est-il du reste. Comment ça se passe à la maison ? Quelles sont les choses qui sont imposées ? Quelles sont les choses dont tu vas peut-être avoir besoin ? Il faut obtenir leur confiance. J’adore les défis. Mais le défi sera toujours lié aux individus. Si vous ne prenez pas le temps de les connaître, de savoir qui ils sont et quel est leur système de soutien contre lequel vous devez parfois vous battre dans une certaine mesure. Parce que lorsque vous essayez d’entraîner des joueurs ou des joueuses, vous devez aussi faire taire le bruit qu’il y a derrière eux pour qu’ils puissent vous comprendre pleinement. 

On a la chance de travailler avec tant de personnes intéressantes et quand on prend le temps de les connaître, on peut faire tellement de choses. C’est à ce moment-là que, j’appelle cela de la « magie, » la magie opère. La magie opère quand on prend son temps. C’est comme quand on fait des gâteaux. »

Quel conseil donneriez-vous à un.e entraîneur.e plus jeune ?

« Il faut revenir en arrière pour en apprendre plus sur soi-même. Pour comprendre son style. Il faut entraîner des jeunes, parce que vous devez accumuler de l’expérience. Accumuler de l’expérience, c’est entraîner des équipes jeunes d’âges différents mais aussi entraîner des garçons et des filles. Pour moi, c’est probablement le meilleur conseil que j’ai jamais reçu et je pense que ça m’a permis d’être l’entraîneure que je suis aujourd’hui. Je sens que je continue toujours de progresser. Quand un entraîneur pense avoir tout appris, ce n’est pas le cas. C’est comme le retour de Michael Jordan. À chaque fois, chaque saison, il dit qu’il a appris quelque chose. On apprend tout le temps, et on apprend constamment des athlètes qu’on entraîne. 

Il faut repartir du début. C’est trop facile de commencer à entraîner au niveau universitaire comme je l’ai fait, sans passer par le niveau amateur. C’est comme ça qu’on peut créer son style et commencer à avoir sa propre voix parce qu’on est encore la voix de l’entraîneur qui vous a entraîné. Quand vous commencez à développer votre propre style, vous commencez à comprendre les différents types d’individus et les styles d’apprentissage autour de vous pour continuer à progresser. Parfois on essaie de prendre un raccourci, mais on a encore tant à apprendre. »