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Quelqu’un comme moi ? Mon combat contre la santé mentale

Anciens

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17/5/2022

Hanna,

Je pense que tu aimerais savoir que les choses vont bien maintenant. Tu vas bien, bien mieux que tu ne l’aurais imaginé il y a encore quelques années. 

Quand tu essayais de t’entraîner plus longtemps, de travailler plus dur, d’être plus mince – tout s’est emmêlé…  et ce que tu pensais être une éthique de travail saine s’est transformée en trouble alimentaire et en une crise de santé mentale sans que tu ne le réalises. 

Malgré ta souffrance à l’intérieur, à l’extérieur tu avais toujours l’air forte. Je suis tellement fière des efforts que tu as fournis pour en arriver là et je ne veux plus jamais que tu prennes ta santé mentale pour acquis. 

Cette lettre ci-dessous est pour tous ceux qui ont pu se reconnaître à travers les choses que tu te disais avant. Maintenant que tu es passée de l’autre côté, tu as fait la promesse d’utiliser cette expérience pour aider les autres. 

 

« Je n’aurais jamais imaginé que quelqu’un comme toi aurait des problèmes en matière de santé mentale ! » 

Moi non plus. 

Quelqu’un comme moi ? Pourquoi quelqu’un comme moi souffrirait de sa santé mentale ? Des offres de bourse pour deux sports. Des bonnes notes à l’école. Deux parents incroyables qui ont tout fait pour me donner le plus d’opportunités possibles. Une sœur qui a été un modèle incroyable pour moi. 

Avec tous les privilèges que j’ai eus dans ma vie, ne serait-ce pas égoïste de décevoir les gens autour de moi ?

Ingrate. C’est ce que j’ai pensé de moi. Pourquoi quelqu’un comme moi aurait-il une raison d’avoir des problèmes de santé mentale ?  

« Apprécie ce que tu as », « Travaille plus dur que les autres, même quand tu es fatiguée », « Travaille plus dur si tu ne vois pas de résultats, », « Fais en plus ». C’était les messages qui se répétaient sans cesse dans ma tête pendant des années. 

On entend constamment des mantras tels que « Ne sois jamais satisfait », « Le travail ne s’arrête jamais, » et « Il faut souffrir pour réussir, » dans l’environnement d’un athlète, de façon quotidienne. J’ai écouté ces mantras depuis que j’ai commencé à faire du sport sans jamais penser combien cela aurait un impact sur mon avenir.

 

« Quand est-ce que j’ai commencé à rencontrer des problèmes ? »

Les êtres humains ne sont pas prêts pour les transitions. Personne n’aime voir leur identité balancer dans différentes directions tout en essayant de chercher à s’adapter à un nouvel environnement. La réponse facile à l’origine de mes problèmes est de rejeter la faute sur l’université, mes aspirations liées à la haute performance, ou de rejeter la faute sur le stress à l’école. C’est sûrement à cause de ça que j’ai eu du mal, n'est-ce pas ? Malgré la façon dont je me sentais au fond de moi, je n’ai jamais laissé rien transparaître à l’extérieur. Tant que personne ne connaissait mes problèmes, je n’aurais pas honte, non ?

« Tu es allée si loin, ce n’est pas le moment de décevoir maintenant. » 

Alors que mes difficultés empiraient, j’avais l’impression que je ne pouvais entendre que ça dans ma tête. 

Sur le terrain ou dans la gym, pendant des séances d’entraînement et de musculation supplémentaires, même tard le soir dans la salle d’étude. J’ai commencé à devenir obsédée par l’alimentation saine. C’était la boucle dans laquelle j’étais enfermée.

Tous.

Les.

Jours.

Dans mon emploi du temps quotidien, je ne prenais pas le temps de ressentir de la satisfaction, car je n’avais pas le temps de décevoir ou de ne pas être à la hauteur des attentes. Peut-être que si j’étais un peu plus mince, un peu plus rapide, un peu plus forte, un peu plus intelligente -  alors peut-être que je me sentirais un peu plus accomplie. 

« Hanna, ralentis. Des petites choses peuvent faire la différence. »  

Je suis rapidement passée d’un état d’esprit compétitif à un état d’esprit obsessif.

Je n’avais pas peur à l’époque parce que je ne comprenais pas vraiment ce qui se passait. Tout ce que je savais c’est que je n’étais pas satisfaite. Je n’étais pas fière de qui j’étais en tant qu’athlète. Quelle personne ingrate, non ? 

Non. 

 

Ce que j’ai appris, c’est que la santé mentale n’est pas liée à l’appréciation de ce qu’on a déjà dans la vie. On peut être incroyablement content des choses et des gens qui nous entourent et souffrir d’une maladie mentale. Oh, et cela ne discrimine personne. Votre genre, forme, taille, sport – rien de cela n’est important. On peut tous connaître ces problèmes.

Après des années à vivre avec un trouble alimentaire en tant qu’athlète de haut niveau et gérer les effets de santé à long terme qui continuent des années après, j’ai enfin compris. Mais pendant beaucoup de temps, je me remettais en question. 

« Pourquoi faire tous ces efforts, juste pour ces leçons simples ? Tu as gâché ta vie. »

Je me suis dit que j’aurais dû apprendre plus et avoir plus d’empathie pour les gens autour de moi qui connaissent vraiment des difficultés. De l’extérieur, ma vie avait l’air bien. Donc je me suis dit ça. Les choses vont bien. C’est bien, je vais bien.

Quand les choses n’allaient pas, je me disais que peut-être il fallait que j’atteigne le fond pour rebondir et aller où je voulais être. 

Là encore, non. 

J’ai appris que je n’avais pas besoin d’atteindre le fond. En fait, s’il-vous-plaît, ne faîtes pas ça. Nous avons perdu trop de gens tout en bas. 

« Ok, juste une dernière question Hanna – Qu’est-ce qui t’a décidé de parler publiquement de tes problèmes ? » 

Parce que… si seulement j’avais su. C’est ce que je me dis à chaque fois qu’on me pose cette question. Je me demande ce qu’aurait été ma vie. Serais-tu une athlète pro, une Olympienne ? Peut-être. Ou peut-être pas. Peut-être que je n’aurais eu aucune raison de me battre contre une maladie mentale. 

Peut-être que je n’étais pas au courant tout simplement. 

De l’extérieur, tout paraissait bien. Et tout parait bien encore aujourd’hui. Seulement aujourd’hui, j’ai appris à être honnête quand ce n’est pas la vérité. 

La vérité c’est qu’on ne peut pas normaliser ce genre de conversations sans avoir de conversation. Des discussions ouvertes et honnêtes sur ses pensées, ses difficultés, sa douleur et sur les leçons qu’on a apprises. Il y a tant de leçons que j’ai apprises à travers mes expériences. Mais, si seulement je connaissais ces leçons avant de les apprendre moi-même. 

Aujourd’hui, mon objectif est d’enseigner ces leçons précieuses, en espérant que quelqu’un qui cherche des réponses puisse les trouver ici.

 

La maladie mentale ne discrimine pas. Vous pouvez vivre une vie parfaite et avoir des problèmes liés à votre santé mentale. Ne mettez pas les athlètes sur un piédestal. Ce sont des humains, tout comme vous. Oubliez l’idée que les récompenses extérieures vont vous permettre d’être satisfait à l’intérieur. Vous serez déçus.  

Cela demande beaucoup d’efforts. Peu importe leur nombre, appuyez-vous sur les personnes qui vous entourent. Cela demande du courage. Demandez-leur des nouvelles. Vous réaliserez très rapidement que cela vous permettra de faire une introspection sur vous-même. C’est une situation gagnant-gagnant. 

Vous ne manquez pas de gratitude parce que vous éprouvez des difficultés. Les deux peuvent coexister. Ne soyez pas trop dur avec vous-même. 

Quand on grandit, on s’accepte. Quand on s’accepte, on devient vulnérable. Soyez prêts à être vulnérables. 

Si j’avais appris ces leçons, est-ce que ma vie aurait été différente ? Probablement. Mais, est-ce que je changerais mon expérience pour que quelqu’un d’autre ait à subir tout ça pour me donner le même conseil ? 

Absolument pas. 

Ma maladie mentale est ce qui me rend unique. Je n’en ai pas honte. J’en suis fière. Cette mentalité n’est pas facile à avoir – je dois m’en souvenir tous les jours. Mais je dois m’en souvenir tous les jours. Mais j’en vaux la peine. 

Vous en valez la peine. 

Si vous ou quelqu’un autour de vous vous sentez/se sent concerné après avoir lu cet article, veuillez bien vouloir contacter une de ces ressources incroyables. Ces conversations ne sont pas faciles, mais elles sont nécessaires. 

Avec beaucoup d’amour fou, 

Hanna Hall